Si Sasha m’était conté…

1990 France URSS dans le Val d'Oise

Avec mon pote Cyril, fraîches recrues du Sport Etudes de Bois-Co, on déboule dans le gymnase. On retrouve JP Thorn, Nathalie Treil et Fabrice Schwertz, bien entendu. On découvre Sasha. A l'entraînement, en bas de jogging un peu flottant, il nous "pète" une série Full in rudy lay, miller tuck, full in rudy tuck, miller lay... Bras le long du corps du début à la fin. Je ne vous explique pas le choc.

1992 WAG à Auckland (Nouvelle-Zélande)

Avec l'équipe IDF, on arrive près de deux semaines à l'avance pour assister au championnat du Monde. Le jour des finales, c'est le rassemblement des individuels avant leur défilé d'entrée. Tout le monde le cherche, personne ne le trouve. Où est-il ? Où est Sasha ? Quelques minutes plus tard, son partenaire de synchro de l'époque, Sasha Daniltchenko, sort du groupe pour se rendre dans les tribunes. Et là, dans un coin, au bord d'une poubelle... Il est LA ! Il dort. Sasha D. le réveille... Ils descendent en chambre d'appel. Mos se frotte les yeux, se passe la main dans les cheveux pour se recoiffer, baille largement à l'appel de son nom, est le premier à mettre les pieds sur le trampo pour l'échauffement spécifique et "sort" un triff pike, tendu, triff tuck de l'espace. Bonjour ! 10 passages plus tard, il devient double champion du Monde.

1994 WAG à Vila do Conde (Portugal)

Avec l'équipe de France, on arrive tout juste le jour des finales. Mos est là. Il n'est même pas en tête à l'issue des qualifs. Mais, il ne dort pas cette fois. Il entre dans la légende en remportant un troisième titre mondial consécutif avec 14.0 de diff. à 9 d'exe et, 20 secondes au chrono. Pour beaucoup, moi compris, cet exercice reste le meilleur jamais vu.

1995 France Russie à Paris (salle Pierre de Coubertin)

Fabrice Schwertz ne peut se présenter. Franck Bardy me demande de le remplacer. Je suis excité ! Et, je rejoins la tournée. J’arrive dans le gymnase. Mon premier réflexe ? Me mettre en tenue d’entraînement pour aller tout « casser ». Donc, je rentre dans le premier vestiaire venu… Et, me trompe en rentrant dans celui des Russes. Là, je les vois en bande en train de jouer aux cartes et serre la main, pour la première fois, du Sasha. Je me change dans un coin « vite fait » et fonce dans la salle. Quelle soirée ! J’ai eu droit à un synchro avec Mos et un mot de félicitations de sa part pour mon Half triff pike. Pas peu fier le petit Manu. Plus tard, durant la troisième mi-temps, Olga Louskina (la traductrice officielle) me fit le plaisir de traduire les bons mots que Sasha me réservait en ce début d’année. Toute une rencontre.

1996 Coupe du Monde à Krasnodar (Russie)

Avec David, c’était notre première coupe du Monde « officielle ». Et pour bien commencer, elle avait lieu à Krasnodar, la « capitale » du trampoline. Le jour de la compétition, nous retrouvons Sasha et sa famille (sa femme et son fils, Nikita) Il a pris du poids le gars Mos et, pas qu’un peu. A la fin de la compétition, lors de la remise des prix, il me remet « son prix spécial ». Un Samovar. Une fois de plus, pas peu fier le petit Manu. Seulement, il fait l’erreur de me le remettre avant le banquet. Banquet que je passerai, en partie en sa compagnie et, où il me mettra en garde face aux effets dévastateurs de la vodka locale. J’aurai du l’écouter, lui et les autres (hein, Dave ?) Bref, le Samovar, il ne mettra jamais les pieds en France et Franck portera une nouvelle cravate mais ça, c’est une toute autre histoire ;)

1997

On apprend que le trampoline fera partie du programme olympique. Et, on entend dire que Sasha a repris l’entraînement. Pour une nouvelle !

1998 Championnat du Monde à Sydney (Australie)

Sasha est là. Il n’est pas prêt physiquement et n’est pas encore revenu à son libre indiv de l’époque mais, n’empêche qu’il est là. Il fait de « tristes » qualifs individuelles mais, score un 41 en finale par équipe et donc, me montre fièrement sa huitième médaille d’or : « It is number 8 ». En fin de compte, heureusement qu’il n’était pas trop prêt.

1999 Championnat du Monde à Sun City (Afrique du Sud)

On rentre dans la salle pour notre première journée d’entraînement. C’est bizarre, les Russes étaient avant nous et je ne vois pas Mos, en revanche, il y a ce « petit nouveau » qui n’a pas l’air mal du tout. Je regarde de plus près mais, ce « petit nouveau »… C’est Mos ! Incroyable. Il a fondu comme neige au soleil. Et, il est dans une forme olympique à un an des Jeux. Je n’en reviens toujours pas.

2000 Jeux Olympiques de Sydney (Australie)

Première journée d’entraînement. Alors qu’il pose à peine son pied sur le sol australien (il a atterri la veille et, avec tout ce décalage horaire…) il réalise une copie conforme de son 14 de 1994. Ce moment là, je n’avais aucun doute que la médaille d’or ne lui échapperait pas. La devise olympique est Citius, Altius, Fortius. Pour Sasha, c’était plus Veni, Vidi, Vici.

2001

On entend dire que Sasha n’a pas arrêté l’entraînement. Et, qu’il compte bien doubler son titre olympique. Pour une autre nouvelle ! La suite, vous la connaissez mieux que moi...

Enfin, ce que je retiens de Sasha, c’est cette capacité à gagner quand il le faut. Et, avec la manière à l’image de son bifol en neuvième de 14. Ce féroce appétit de victoire et cet insatiable goût pour l’or.

Ce que j’aime chez Sasha, c’est sa bonhomie et son amour vorace pour le trampoline. Je vois encore la lumière dans ses yeux quand il me montra sa médaille d’or olympique qu’il embrassait comme on embrasserait sa femme… C’est d’ailleurs la façon dont il parlait de sa médaille : « 26 years of love »